lundi 16 mai 2016

Les Mystères du Wesh

À trois ils déambulent et sur la butte ils bullent
Ces banlieusards blédards, modernes parigots,
Ils glandent insolemment, c’est la faute à Poulbot
Ponctuant de leurs wesh le moindre préambule.

« Wesh Madame, t’as du feu ? » Dit le plus ridicule
D’une démarche étrange, il s’approche à pas lents
Sa casquette en cupule lui donne un peu l’air gland
Pendant que les deux autres, amusés, le calculent.

« Pas besoin de briquet, j'suis déjà enflammé
Parole » ajoute-t-il, la main contre son cœur.
« J'suis pas un boloss, wesh, et j't’offre pas des fleurs :
Rien qu'en les regardant, tu les aurais cramées »

À sa galante audace, les potes se gondolent
Et moi, je glisse un œil narquois sur ses godasses
Je remonte lentement à son jean taille basse
Pour finir à son cou où luisent des babioles.

Mon regard est stoppé par son lobe d’oreille
Où luit un faux diamant. Soudain l’envie me sangle
(D’un joli petit Lu, ce morceau semble l’angle)
De croquer dans sa chair, qui me semble merveille.

Il a pris mon regard pour un air méprisant
Et déjà il s’éloigne. Ses épaules balancent
C’est à ce moment là que ma bouche lui lance :
« J’ai du feu, laisse un peu tes amis, à présent. »

Charnelle

Notre façon d’aimer, à nous deux, est charnelle,
Romantisme foutraque mélangeant un peu tout,
Tendresses impudiques où se brouillent pêle-mêle,
Sentiments exaltés, miaulements de matous.

— Comment vas-tu ? Dit-il, tout en me caressant
— Je vais bien, je suis là et je sens ton odeur,
Déjà, j’ai oublié ailleurs les mots blessants.
— J’étais inquiet pour toi. — Ne t’en fais pas mon cœur.


C’est étonnant de voir qu’il me guérit de tout
Que mes peines s’enfuient toujours sous ses ardeurs,
Comme le roi de cœur, irrésistible atout
Je le garde en ma manche, lorsque j’ai du malheur.

— Parle-moi. Me dit-il, après m’avoir fait jouir
Et je parle soudain de tout ce qui m’opprime.
Je n’omets rien, alors, j’ai cessé de les fuir
Mes silences et mes doutes, car enfin le vrai prime.

Puis on se couche en rond comme des chiens de faïence
Rêvant que cette vie pourrait être éternelle :
Se baiser en criant, s’adorer en silence,
Notre façon d’aimer, à nous deux, est charnelle.

Te revoir

Pendant tout un long jour, en démêlant mes peines,
Obsédée de revoir tes pupilles obsidiennes,
Patiente comme Elsa, assise à son miroir,
Je me repeigne aussi et mes cheveux sont noirs.

Les jours me semblent longs, je joue la comédie
J’évite les palabres, j’en ai déjà trop dit.
En lissant mes cheveux, me revient la mémoire
De nos moments heureux, musée de mon boudoir.

Je pense à Aragon, peignant à l’encre noire,
Les cheveux blonds d’Elsa qui reflétaient l’histoire
Tragiquement obscène et ses moments maudits.
Ils nous tourmentent encore, comme il l’avait prédit.

Balancée entre joie, amour, tristesse et haine,
Mes cheveux, lentement, de mes doigts je les peigne.
La boucle se referme et je renoue l’espoir,
J’attends un mot de toi pour enfin te revoir.

lundi 21 mars 2016

Narcisse

En m’en allant, joyeuse, faire la fête à ton corps
J’ai acheté pour toi un bouquet de narcisses
Que vendait un vieillard, accessoire au décor,
Sans soupçonner qu’elles soient pour un bel Aloïs.

Ces fleurs te ressemblent dans leur tendre fraîcheur
Toi qui te sais aimé de moi et qui en joues,
Comme ton regard se fait troublant et aguicheur
Quand tu sais que ton charme me garde sous ton joug.

Tu es gorgé, comme elles, de sève sirupeuse :
Il me plaît de croquer la corolle gracile
De ton lobe d’oreille, de ta lèvre pulpeuse
Et tu me laisses agir, comme un enfant docile.

Mon jardin est pour toi tout peuplé de jonquilles,
Des femmes, je le sais, également t’admirent
Mais c’est dans l’eau bistrée de mes seules pupilles,
Narcisse, qu’il faudra, toujours, que tu te mires.